Hold up sur nos fruits et légumes

L’émission cash investigation a pour habitude de décrypter les sujets les plus controversés : le gluten, le sucre… Animée par Elise Lucet, l’objectif est vraiment d’apporter un maximum d’information. Cela permet de bien comprendre le sujet et de se faire son propre opinion. On y constate régulièrement que les lobbies industriels ont souvent la main mise sur les différents marchés.

Une des dernières diffusées, portait sur le thème : hold-up sur nos fruits et légumes. Le même constat est fait que pour beaucoup d’autres sujets : l’industrialisation a dégradé la qualité de nos aliments mais surtout a diminué la biodiversité mettant en danger notre alimentation présente et future. Je tenais à vous en parler et surtout à vous expliquer quelles sont les solutions alternatives.

Je vais donc commencer par vous résumer l’émission (hold up sur nos fruits et légumes) que vous pouvez retrouver sur Youtube mais surtout, vous proposez des solutions alternatives.

L’émission démarre sur un constat : Les semences croisées, sélectionnées, sont là pour obtenir des légumes standardisés, calibrés comme des produits industrialisés. Cela a pour conséquence la perte de nutriments et de gout.¨

Parmi les industriels, on retrouve une entreprise française : limagrain, 1er semencier français et 4ème semencier au monde. Ses semences sont produites dans plusieurs pays différents dont l’Inde qui est l’un des plus grand producteur de semence de légumes. D’après le lobby : “Une semence non contrôlée pourrait donner un légume toxique susceptible de provoquer une intoxication! “ Hors certaines semences peuvent avoir un impact sur notre santé. C’est notamment le cas du blé : les modifications faites ont modifié le blé. Le pain avait une très bonne qualité nutritionnelle mais il ne vaut plus rien pour la santé. Le gluten est de moins en moins digeste.

Il existe un livre : “la table de composition des aliments” qui date d’il y a 60 ans. Ce livre est la bible des nutriments des légumes ; pour chaque fruit et légume, on retrouve leur teneur en vitamines et minéraux de l’époque. Une comparaison avec les chiffres d’aujourd’hui a pu être faite grâce au site ciqual qui est la base officielle actuelle gérée par l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.) Constat : les fruits et légumes sont vidés d’une partie de leurs vitamines et de leurs minéraux.

légumes.1

70 des légumes les plus consommés par les Français ont été comparés : en moyenne, on constate –16% de calcium, –27% de vitamine C, –48% de fer.

Il semblerait normal que cela inquiète l’ANSES mais leur réponse est pour le moins déconcertante :

“ Pas d’étude sur l’évolution nutritionnelle des fruits et légumes. Pas forcément d’intérêt à comprendre comment évolue la composition des pommes.”

Peut être le rôle de l’INRA mais leur réponse est du même genre : “Pas d’étude depuis 50 ans !”

Du côté des Etats Unis, un biochimiste réputé de l’université du Texas : Donald Davis, a étudié le sujet. Il est spécialiste de la chute des nutriments dans les végétaux. Il a analysé 43 végétaux entre 1950 et 1999 et a constaté que le déclin est en partie lié à l’augmentation du rendement. Plus le rendement augmente, moins il y a de nutriments dans les végétaux.

Le fruit le plus touché par cette perte de nutriments : la tomate.

En 50 ans, elle a perdu 59% de vitamine C. Hors c’est le fruit le plus consommé : 850 000 tonnes par an. Les 2/3 sont cultivées en France. Mais quand on pense trouver les productions dans le sud, il n’en est rien, le plus gros producteur de France se situe en Bretagne dans des serres chauffées et en production hors sol. Plusieurs marques sont cultivées là bas : Savéol, Prince de Bretagne, Océane, Solarem. Toutes ont été contactées, toutes ont refusés que l’équipe entre dans les serres. 90 % des tomates françaises sont cultivées hors sol dans des serres chauffées à 21°C une grande partie de l’année. 

Le CTIFL (centre de recherche financé par l’état et les producteurs de légumes) a accepté d’ouvrir les portes de ses serres. Elles servent à étudier comment on peut augmenter la production de légumes sur le moins de surfaces possibles. Les serres sont en légère surpression pour que les insectes non désirés restent à l’extérieur ce qui permet de ne pas utiliser de pesticides. Les plants de tomates sont plantés dans un sol reconstitué de laine de roche minérale ce qui évite que l’herbe pousse et permet donc de ne pas utiliser d’herbicides. Les plants sont nourris grâce à des apports de solution nutritive contenant azote, phosphore, potassium, magnésium…Ce système permet une production plus rapide, avec une plus grande quantité et permet de fournir des tomates de fin mars à fin novembre. Les fruits sont homogènes, de même forme et de même calibre !!! Propos du directeur : “Le standard n’effraie plus les gens […], c’est un phénomène de réassurance ; le consommateur est rassuré par des éléments standardisés, les normes sont là pour le rassurer.”

Mais ces tomates ont-elles la même qualité nutritive que de tomates qui poussent en pleine terre ?

Direction Carcassonne pour une culture de tomates 100% nature, en semi-liberté dans les serres de Jean Luc Brault. Il travaille la terre sans produits chimiques ni autre substitut. Le paillage avec de la paille permet de maintenir une diversité de vers de terre et de micro-organismes. C’est cette diversité qui apporte les éléments nutritifs et la qualité gustative des fruits. Jean Luc Brault a travaillé en hors sol, pour lui, il est impossible de recréer un milieu plus nutritif et plus équilibré que la terre.

Comparaison des 2 cultures est faite en laboratoire agréé ; le résultat est sans équivoque. La tomate hors sol a beaucoup moins de nutriments que la tomate pleine terre.

légumes.3

Le lycopène et le polyphénols sont des anti-oxydants qui aident à lutter contre les maladies cardio-vasculaires et le cancer.

Sylvain Chaillou, spécialiste de la nutrition des plantes et chercheur à l’école agro-paris-tech pendant 30 ans, a étudié l’impact du hors sol sur les végétaux. Plusieurs facteurs influent sur la qualité nutritionnelle et notamment, la quantité d’eau apportée en hors sol qui est constante et qui entraîne la dilution du calcium, du phosphore et du magnésium. Les plantes ont besoin de subir des contraintes pour fabriquer des nutriments tel que la sécheresse, la chaleur…

Autre question :  la variété a-t-elle un impact sur les qualités nutritives ? Qu’en est il de la qualité des semences ?

Le choix des semences se fait sur un catalogue édité par les industriels. Sont mis en évidence la taille, la forme, la couleur et la productivité de chaque fruit ou légume. Autre critère précisé : la lettre HF qui correspond à hybride de première génération. 98% des variétés vendues aux agriculteurs répondent à ce critère. Une variété hybride provient d’un croisement entre 2 plantes. Depuis 50 ans, on crée des hybrides pour avoir des légumes qui résistent à tous les chocs ! Ils subissent même des crash test comme les voitures !

En Israël, un homme, Raï Rabinovitch, a créé la tomate qui ne s’abime pas. Il crée les hybrides sous serre pour le compte des industriels. La création de tomates longue durée permet de les transporter grâce à un croisement avec une variété porteuse d’un gène bloquant le mûrissement.

Expérience faite avec une tomate hybride et une tomate paysanne :

Au bout de 8 jours, la tomate paysanne est tachetée de noire, elle est invendable. Quant à la tomate hybride, elle n’a pas bougé.

Au bout de 15 jours, la tomate paysanne commence à moisir et l’hybride n’a toujours pas bougé.

Il faut attendre 3 semaines pour que la tomate hybride commence à se dégrader (peau moins tendue, quelques taches noires). La durée de vie commerciale  d’une tomate hybride est donc de 3 semaines contre 8 jours pour une tomate paysanne.

Ce gène qui bloque le mûrissement a des effets indésirables, il détériore le goût.

Au début des années 2000, Raï Rabinovitch propose de créer une tomate ACE contenant les vitamines A, C et E. Cette tomate serait meilleure pour la santé mais “les industriels s’en fichent”. Il travaille toujours pour les poids lourds de la semence comme limagrain qui est le n°2 mondial de la graine de tomate. Leur objectif est de faire une belle tomate ferme et ayant du goût, par contre, aucun intérêt pour les nutriments : “ ce n’est pas un enjeu économique”.

Une étude publiée par le professeur Klee a démontré qu’il y avait un lien entre le goût et les nutriments. Une tomate qui a bon goût a une bonne teneur en nutriments.

légumes.5

Des semences sélectionnées :

Actuellement, les graines produites par les grands industriels de la semence sont des graines à usage unique de catégorie F1 ; inutile de récupérer les graines des fruits et légumes produits, vous n’obtiendrez que des plants stériles. Hors, produire ses graines ne coûte rien ! Cela devrait être à la portée de tous. Le marché des graines est un marché très rentables ; 1 kg de graines de tomates jaunes est vendu 400.000 euros !!! Pour une tomate de base, comptez la modique somme de 60.000 euros pour 1 kg de graines !!! C’est le légume qui fait la plus grosse marge car le plus demandé.  La production de ces graines se fait dans 22 pays différents où la main d’œuvre n’est pas chère comme l’Inde. Pays où le travail des enfants est monnaie courante.

légumes.6

La semence de tomates est le secteur qui embauche le plus d’enfants car ils sont plus rapides et plus obéissants que les adultes.

Par ailleurs, le salaire minimum n’est pas respecté que ce soit pour les enfants ou pour les femmes ; il est de 2.5 € au lieu de 4.25€ pour 8h de travail par jour. Un fermier est payé 102€/kg de graines qui est revendu 60.000€ ! Un salarié Limagrain touche 3.6 € par jour. Ces chiffres sont niés par la direction de Limagrain.

De nos jours, il est quasi impossible d’échapper aux graines hybrides car les multinationales ont privatisé la nature !!

Selon la loi, pour vendre une semence, elle doit être inscrite dans un catalogue appelé : “le catalogue des espèces et des variétés de plantes cultivées en France.” On y trouve 8353 variétés. Si on prend un exemple comme le melon, 91% des graines figurant dans ce catalogue sont des hybrides datant de moins de 25 ans. Pour le maïs, 100% des variétés ont été crées dans les années 2000. Le critère de sélection pour figurer dans le catalogue : une plante calibrée et homogène.

2/3 des semences vendues dans le monde appartiennent à 4 multinationales : Bayer-Monsanto ; Limagrain ; Dowdupont ; Syngenta.

Et la biodiversité dans tout ça ?

75% des plantes cultivées ont disparu. Hors la biodiversité est importante pour faire face aux aléas climatiques à venir que l’on ne peut pas anticiper. Biodiversité qui est aussi fragilisée par l’usage des pesticides et autres produits chimiques. Eux même fabriqués par 3 des multinationales citées ci dessus : Bayer-Monsanto ; Dowdupont ; Syngenta. 3.000.000 de tonnes de pesticides sont écoulées chaque année dans le monde. En France, on constate une augmentation de 16% d’utilisation de pesticides depuis 2010 !

Un amendement a été voté à l’assemblée nationale en 2018, permettant de vendre les semences paysannes non inscrites au catalogue aux particuliers ; il a été censuré par le conseil constitutionnel pour vice de forme. En opposition à cet amendement, le GNIS (groupement national interprofessionnel des semences) dans lequel on retrouve comme adhérent : Bayer-Monsanto, Limagrain, Syngenta ; a diffusé une vidéo sur internet intitulé “sauvons nos jardins” dans laquelle il prétend que, sans le catalogue, le jardinier amateur ne saurait plus ce qu’il plante et perdrait la garantie de planter des semences indemnes de maladies !

Voici la vidéo :

Article expliquant l’amendement voté à l’assemblée nationale :

https://www.semencespaysannes.org/les-semences-paysannes/vie-du-reseau/57-les-semences-interdites.html

Les semences hors catalogue sont elles une véritable menace ?

Lors d’une interview d’un membre du GNIS, on comprend que : “le catalogue représente la sécurité, les variétés, le côté sanitaire […] afin de garantir à tout acheteur que tout ce qu’il va acheter est indemne de toute cochonnerie.” Hors quand on épluche le règlement, il n’y fait mention nulle part d’un contrôle sanitaire des semences !!!

Après recherche auprès des agriculteurs céréaliers, certaines semences utilisées pour produire du blé pour Limagrain ne seraient pas inscrites au catalogue. Par exemple pour les pains Jacquet qui représente 80 millions de paquets/an. Ce blé est produit en Auvergne ; les semences sont roses car entourées de pesticides. C’est une variété réservée à Jacquet et non inscrite au catalogue. Lors de l’enquête, 7 variétés de blé collectées auprès des agriculteurs ne sont pas inscrites au catalogue, ce qui représente 1/4 des blés cultivés en 2018.

Mais comment est il facturé si il n’est pas inscrit au catalogue ? Il apparaît sur les factures comme assistance technique et savoir faire ; Limagrain prétend vendre des conseils auprès des agriculteurs mais aucun d’entre eux n’a reçu ces conseils !!!

La suite du reportage porte sur le blé et son impact sur la santé dont j’ai déjà parlé dans un article précédent : Et si on parlait gluten. 

Mais cet article étant déjà bien long, je publierai un autre article pour vous expliquer la suite de l’émission : « hold up sur nos fruits et légumes » et je vous exposerai les solutions alternatives.

Partagez l'article

Articles recommandés

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *